Lettre ouverte à monsieur Germinal Peiro  président du conseil départemental.

 

 

     S FORÊTS

PRISES EN OTAGE

“Ecouter les forêts qui poussent plutôt que l'arbre qui tombe ” (Friedrich Hegel )

Le sens de l’histoire ou plus exactement ce que nous appelons avec résignation parfois “l’évolution  actuelle”, depuis une bonne vingtaine d’années, consiste à faire “évoluer” nos forêts traditionnelles avec une gestion pérenne vers une sylviculture monotype, exclusivement résineuse, au service et aux ordres d’une économie ultra libérale.

Le but à peine dissimulé étant de faciliter le passage d’une gestion durable à une gestion rentable à court terme !

Nos forêts et nos bois doivent désormais se standardiser afin de s’adapter aux normes d’exploitation et de marché fixées par l'industrie. Çà n’est plus l’homme qui est au service de la nature mais la nature qui est là, à disposition, pour satisfaire aux modes et caprices de l’être humain et servir des intérêts financiers, en transformant nos massifs en usine à produire du bois.

Une politique industrielle et forestière qui ne voit dans la forêt qu’une ressource minière inépuisable au seul prétexte que la biomasse serait éternellement renouvelable !!!

Une gestion et une vision empruntées et calquées sur le modèle de l’agriculture intensive dans ce qu'elle a de plus négative .

La forêt réduite à un rôle de simple produit. Après coupe rase, le sol est défriché puis travaillé et planté. Ensuite on a recours à des engrais, des pesticides et autres produits à usage de débroussaillant dans le seul but d’éliminer toute concurrence, car dans la sylviculture moderne les terrains doivent être propres !! Ces travaux de préparation des terrains sont totalement inadaptés aux sols forestiers et de plus dévastateurs. Le décapage qui rend stérile les sols, justifie ensuite l’utilisation des engrais pour compenser l’absence de matière organique et nutritive.

Même réflexion pour l’emploi des pesticides, qui sont utilisés pour détruire notamment les “hylobes”, charançons ravageurs des reboisements résineux, dont la monoculture résineuse favorise de façon évidente la prolifération en éliminant toute concurrence.

L’exemple le plus parlant aujourd’hui de cette orientation économique, reste la “culture” du sapin de Douglas (originaire de la côte ouest de l’Amérique du Nord) dont l’objectif premier est de produire à court terme du bois pour la fabrication de palettes à usage unique. Alors que c’est un arbre qui pourrait être non seulement utilisé pour la construction avec une plus-value économique certaine, mais qui aussi se régénérerait naturellement évitant ainsi tous ces travaux du sol inadaptés, inutiles et très onéreux pour les propriétaires ! Encore faudrait-il que nous lui laissions le temps de croître et d’atteindre son âge de maturité !

L’arrivée des « abatteuses », véhicule lourd désormais utilisé par les bûcherons pour couper, ébrancher et tronçonner les résineux, a accompagné ces plantations et révolutionné le mode d’exploitation, avec une capacité à couper plus de 200 stères de bois par jour, soit l’équivalent d’une douzaine de bûcherons traditionnels aguerris.

Un système économique mis en place, qui ne tient nul compte du temps nécessaire à la croissance des arbres, et qui conduit naturellement à se poser la seule vraie question au-delà de toute polémique : Nos forêts résisteront-elles à cette pression ?

Rien n’est moins sûr, mais il est encore possible de revenir à des modes de gestion raisonnés, dans le respect du cycle de la vie d’un arbre en considérant avant tout l’intérêt général et en gardant présent à l’esprit que le code forestier a été créé sur le constat et l’affirmation selon lesquels les forêts sont un bien public qu’il convient de protéger dans l’intérêt de tous et pour la survie des espèces dont nous faisons partie !

Nos massifs forestiers ont de toute évidence un rôle économique, mais ils ont aussi un rôle écologique, environnemental et paysager. Sans oublier un rôle social majeur dans notre société de consommation et d’immédiateté.

À la fois mystérieuse et poétique, la forêt a su inspirer de très nombreux artistes peintres, plasticiens ou sculpteurs à l’image des mouvements  que sont l’Arte Povera , le Process’Art ou le Land’Art.

Mais aussi des auteurs, des écrivains, des poètes. Citons par exemple « les méditations poétiques » de Lamartine ou « les Contemplations » de Victor Hugo !

Aujourd’hui, le mode de gestion de la forêt, la pression foncière dont elle fait l’objet, son mode d’exploitation à court terme par coupes rases successives suivies de reboisements, son enrésinement sournois mais constant et quasi systématique, sont autant de paradoxes qui contribuent à la négation du métier de forestier dans ce qu’il a de plus noble , c’est-à-dire assurer sa pérennité !

 

Jean-Claude Nouard

Auteur du livre “Forestier de l’État, une vocation !”

Retraité des Eaux et Forêts

Pour lire ou relire le précédent article de Jean-Claude Nouard sur DIGD, (cliquez ici)

• A voir excellent interview sur FR3 : https://www.youtube.com/watch?v=UDFvYfdOHUI

À voir sur ce sujet, “Les Bois Noirs” l'excellent et très instructif documentaire

de François-Xavier Drouet, sur YouTube : https://www.youtube.com/watch?v=YjeQKlOkkUM

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